Dans l’Antiquité, on nomme « asperge » tous bourgeons de plantes sauvages et d’arbustes que l’on consomme : crosses de fougère, ronces, houblon, chou, brocoli, figuier… et bien sûr l’asperge elle-même. Les asperges du genre Asparagus poussent à l’état sauvage dans le sud de l’Europe et le Bassin méditerranéen. Tous ces bourgeons constituent une ressource alimentaire complémentaire pour les populations des campagnes et une gourmandise pour les citadins.
Les égyptologues pensent reconnaître l’asperge sur quelques bas-reliefs et peintures murales datant de l’Égypte ancienne. Elle serait donc cultivée dès 3 000 av. J.-C. Les Grecs anciens consomment uniquement des espèces sauvages. Selon Caton, écrivain du IIe siècle av. J.-C., ce sont les Romains qui ont développé la culture des asperges. Les plus renommées sont pour Pline, naturaliste du Ier siècle ap. J.-C., les asperges de Ravenne considérées comme un produit de luxe. En 301 ap. J.-C., l’Édit du Maximum, promulgué par l’empereur Dioclétien, oblige de vendre une botte de 25 asperges cultivées à 6 deniers. Toutefois, certains, comme les poètes Martial et Juvénal, aux Ier et IIe siècles ap. J.-C., préfèrent les asperges sauvages bien moins chères.
Au Moyen Âge, l’asperge se fait plus rare dans les traités culinaires aristocratiques français. Ce légume fait partie des ressources de la cueillette et doit donc toujours être consommé au moins par les cueilleurs. Les asperges sont conseillées par les médecins pour éliminer les calculs rénaux, car elles font uriner. Elles sont également bonnes pour la vue, l’estomac et pour les « maris paresseux au lit ».
Avec François Ier et à sa suite Louis XIV, l’asperge reprend sa place d’honneur sur les tables royales. Les rois de France en raffolent. Bartolomeo Scappi, dans L’Opéra, en 1570, rapporte, qu’à Rome, on trouve des asperges toute l’année. On les cultive au printemps et en été et on les cueille dans la nature le reste de l’année. Avec la mode des légumes primeurs, on en mange de plus en plus tôt. La Quintinie (agronome) la cultive sous serre chauffée pour en servir dès décembre au Roi Louis XIV. « On mange les asperges par friandises plutôt que pour leur bon goût » nous dit Nicolas Bonnefons, auteur culinaire, en 1655.
Au XIXe siècle, Alexande Dumas énumère toutes les asperges que l’on trouve sur les marchés : il y a les blanches, douces et peu charnues, précoces, les plus renommées étant celles de Marchiennes, de Belgique et de Hollande ; les violettes, charnues d’Ulm et de Pologne et les vertes, peu charnues, à la bonne saveur avec rien à jeter. En Italie, précise-t-il, on aime les sauvages, ce qui laisse entendre, qu’en France, au XIXe siècle, on ne consomme plus ou peu les asperges sauvages.
Pour en savoir plus
André Jacques, Apicius, L’art culinaire, Paris, Les Belles Lettres, 2010, 235 p.
Audot Loui-Eustache, La cuisinière de La campagne et de la Ville, ou Nouvelle cuisine économique, 50e éd., Paris, Librairie Audot, 1829, 339 p.
Bruyérin-Champier Jean, L’alimentation de tous les peubles et de tous les temps jusqu’au XVIe s., traduction de Amundsen Sigurd de la 1er édition de 1560, Intermédiaire des chercheurs et curieux, 1998, 667 p.
Dumas Alexandre, Grand dictionnaire de cuisine (1873), Paris, Phébus, 2000, 613 p.
Franklin Alfred, Dictionnaire historique des arts, métiers et professions exercés dans Paris, depuis le treizième siècle, Paris/Leipzig,H. Welter éditeur, 1906, 256 p.
Flandrin J-L et Montanari M., Histoire de l’alimentation, Paris, Fayard,1997.
Pitrat Michel et Foury Claude coord., Histoires de légumes des origines à l’orée du XXIe siècle., Paris, INRA Edition, 2003, p.
Sabban Françoise, Serventi Silvano, La gastronomie à la Renaissance, 100 recettes de France et d’Italie, Paris, Stock, 1997, 314 p.